Sologne Nature Environnement dénonce l’impact désastreux des tracés Ouest et Ouest-Sud sur l’environnement
Sologne Nature Environnement est interpellée par l‘impact de la traversée de la Sologne, territoire étudié par Sologne Nature Environnement depuis près de 30 ans, par une nouvelle Ligne à Grande Vitesse, et par la négation de cet impact par un certain nombre d’acteurs qui se sont exprimés lors du débat public.
I. Une opportunité du projet discutable
Sologne Nature Environnement souhaite apporter au débat les éléments de réflexion suivants :
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La construction d’une ligne à grande vitesse représente un coût colossal, beaucoup plus élevé que l’amélioration d’une ligne existante. Qui va le prendre en charge ? L’Etat en partie, déjà bien endetté et une participation très lourde des collectivités territoriales sera nécessaire.
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Ne vaudrait-il pas mieux améliorer les réseaux existants pour faciliter les transports des voyageurs qui empruntent le train quotidiennement pour aller à leur travail et pour développer le transport des marchandises par le rail plutôt que par la route, ce qui réduirait bien davantage les émissions de gaz à effet de serre que le présent projet et correspondrait mieux aux objectifs du Grenelle de l’environnement ?
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Ne vaudrait-il pas mieux améliorer également les correspondances au niveau local ?
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Les lignes à grande vitesse sont-elles rentables et le prix du billet ne sera-t-il pas trop élevé pour les personnes à revenu modeste ?
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La création d’activités auprès des nouvelles gares TGV ne se fait-elle pas au détriment des zones non desservies ? ne favorise-t-elle pas les grandes agglomérations au détriment, entre autres, des zones rurales ?
II. Un impact inacceptable des tracés Ouest et Ouest-Sud sur l’environnement
Sur les quatre principaux tracés proposés dans le projet Paris -Orléans - Clermont-Ferrand – Lyon (POCL), il est envisagé que deux d’entre eux traversent la Sologne, région naturelle relevant de la compétence de Sologne Nature Environnement : les tracés Ouest et Ouest-sud.
Notre région est un magnifique espace naturel, le plus grand espace terrestre classé d’intérêt européen du réseau Natura 2000. Elle est déjà traversée par la RD 2020, l’A71 et l’A85, la ligne de chemin de fer Paris - Toulouse. Elle est reconnue comme zone humide d’intérêt international en particulier pour les oiseaux d’eau. De nombreux étangs se situent d’ailleurs sur le tracé. Elle abrite sur les zones potentiellement touchées par le fuseau Ouest de nombreux autres milieux naturels et espèces remarquables, sans oublier des espèces sensibles au fractionnement de l’espace telles que le Cerf Elaphe.
Les forêts domaniales de Vierzon-Vouzeron seraient également fractionnées de façon particulièrement préjudiciable à leur intégrité, sans possibilité de compensation, ce que souligne la contribution de l’Office National des Forêts au débat public.
Notre association, acteur de terrain de la connaissance naturaliste en Sologne, spécialiste des études d’impact et des études d’incidences Natura 2000, considère que les mesures compensatoires éventuelles ne pourront pas permettre de limiter les impacts de manière satisfaisante à un coût acceptable.
La Sologne a été identifiée par les études récentes du Conseil Régional du Centre comme le plus important noyau de biodiversité régional lors de la cartographie régionale de la Trame verte et bleue. L’étude de la Trame verte et bleue de Sologne va débuter prochainement. Quelle serait la cohérence avec cette politique en cas de cloisonnement irrémédiable ?
L’emprise de la ligne à grande vitesse va détruire des espaces naturels sur plus de 1000 hectares en Sologne, n’est-ce pas au détriment de la faune et de la flore naturelles ?
Une ligne à grande vitesse est infranchissable, clôturée tout au long du trajet, alors que la Sologne est déjà trop largement engrillagée. N’est-ce pas au détriment de la circulation naturelle des espèces sauvages, donc de la biodiversité ?
Notons que cette prise en compte de la biodiversité solognote renchérira certainement le coût des tracés Ouest et Ouest-sud, sans parler des risques juridiques considérables liés par exemple aux volontés légitimes de préservation de la Zone Spéciale de Conservation « Sologne ».
Réseau Ferré de France (RFF) précise dans le dossier soumis au débat public que les deux tracés Ouest présentent : « Le risque d’impact le plus élevé sur les enjeux liés au milieu naturel, notamment à la traversée de la Sologne ».
Un certain nombre d’acteurs semblent balayer ce point d’achoppement d’un revers de main en prétendant, certainement de bonne foi, qu’un couplement avec les infrastructures existantes résoudrait cet écueil. Le choix de faire passer la LGV le long de l’A71 a été envisagé par RFF et l’incidence étudiée. Il est important de noter que l’étude complémentaire commanditée par RFF spécifiquement sur la solution du jumelage avec les infrastructures existantes en Sologne, réalisée par l’INGEROP en septembre 2011, est sans ambiguïté : elle conclut que ce choix est le plus impactant des scénarios.
Les répercussions sur la nature et l’environnement sont donc avérées et il est choquant de remettre en question ce fait établi dans le dossier, contredisant ainsi toutes les expertises menées.
L’argument du jumelage, d’apparence séduisante, ne tient donc pas sur le terrain et conduira à ajouter une saignée inacceptable de la Sologne, qui viendra se cumuler avec les atteintes précédemment infligées. Cette option viendrait porter un coup fatal à l’entité Sologne, dès lors définitivement scindée en son milieu. Nous ne pouvons nous y résoudre.
Tout passage légèrement plus à l’ouest se ferait au coeur de la Sologne des Etangs et de la Zone de Protection Spéciale (directive oiseaux), un des joyaux naturels de la Région Centre.
III. Un préjudice grave pour la Sologne sans retombées économiques
Sologne Nature Environnement est favorable au développement de l’attractivité des agglomérations qui entourent la Sologne (Orléans, Blois, Vierzon, Bourges), ainsi qu’au transport ferroviaire, mais cela ne peut se faire à n’importe quel prix. Les engagements environnementaux ne peuvent être mis subitement entre parenthèses et sacrifiés pour quelques coûteuses voire illusoires minutes gagnées, (temps mis pour rejoindre les gares TGV implantées à distance des agglomérations).
L’ancienne route nationale 20, aujourd’hui RD2020, qui borde l’A71 et la voie ferrée existante, représente un axe de développement vital pour l’économie de la Sologne. Une
partie de ses zones d’activité et de son accueil touristique s’y concentrent et historiquement cet axe a favorisé la densification urbaine.
D’importantes infrastructures touristiques indispensables au développement local, sont précisément implantées dans le secteur directement concerné par le projet Ouest (emprise ou en voisinage), sur les communes de Chaumont-sur-Tharonne (Center Parcs), Lamotte-Beuvron (Parc Equestre Fédéral), Nouan-le-Fuzelier (Domaine de Chalès, ferme de Courcimont, Domaine de Mont-Evray, etc…), Salbris (Domaine de Valaudran).
Ces acteurs économiques ne risquent-ils pas d’être fortement touchés par un problème d’enclavement ? par l’amputation d’une fraction de leur territoire ou par son morcellement ? par des nuisances sonores et visuelles de proximité ?
Tout ceci entraînant une moindre attractivité et donc un risque de baisse d’activité ?
Quelques autres questionnements :
- Quelles seront les retombées économiques sur la Sologne, sachant que les gares les plus proches seront : la première, à proximité d’Orléans, la seconde vraisemblablement entre Vierzon et Bourges ?
- L’activité économique déjà peu développée ne se déplacera-t-elle pas vers ces nouvelles gares ?
- Blois sera relié indirectement, cela permettrait de gagner 15 minutes sur un trajet Paris – Blois – le jeu en vaut-il la chandelle ?
- La ville de Romorantin ne restera-t-elle pas enclavée, ne serait-il pas plus opportun d’améliorer les liaisons locales ?
CONCLUSION
Sologne Nature Environnement, en tant que porte parole de la biodiversité en Sologne et défenseur de son développement durable, s’oppose avec la plus ferme conviction à tout tracé qui traverserait la Sologne, et donc aux tracés Ouest et Ouest-Sud.
Les scénarios Ouest et Ouest sud étant nettement moins bien notées que les autres options sur la totalité des 6 principaux critères, selon le dossier du maître d’ouvrage : coûts, gain de trafics, émissions de Co² évitées, impact sur les milieux physiques, impact sur les milieux naturels, impact sur les milieux humains, il convient donc très logiquement de ne pas les retenir.
Dans tous les cas, il serait indispensable de réaliser systématiquement des diagnostics environnementaux préalables précis et complets sur la totalité du linéaire concerné par la LGV si elle devait être finalement construite.
Enfin, Sologne Nature Environnement s’interroge sur l’opportunité même du projet POCL, qui ne lui semble pas un choix adapté pour un développement réellement durable de notre territoire, et ce quelque soit le tracé envisagé.